La ville de Montrouge accueille jusqu'au 03 mars 2016 le salon "Miniartextil, invitation à table". L'occasion de découvrir le panorama sensible, sensuel et spirituel de l'art textile international contemporain. Bonne appétit.
Le haut beffroi de briques s'impose dans la nuit, il a presque un aspect fantomatique. Une fois encore, il accueille "Miniartextil". C'est la 12e édition cette année. Les règles sont toujours les même : les artistes internationaux doivent réaliser une mini œuvre de 20 cm x 20 x 20, à base de fibres textiles, au sens le plus large qui soit. Pour la version 2016, les organisateurs proposent 54 mini-œuvres, entourées de 11 installations, très grand format. J'entre dans la gigantesque salle du rez-de-chaussée, elle semble encore un peu vide, malgré quelques gigantesques créations. Comme toujours, je suis accueilli par un large sourire. Faisant référence à l'Exposition Universelle de Milan en 2015, Miniartexti 2016 a pour thème les nourritures terrestres et spirituelles, tout ce qui se joue autour de la table, espace de partage. C'est parti pour une petite dégustation artistique... Que diriez vous d'un bon croque monsieur ?
Pour le plaisir
Le repas est source de plaisir et parfois de raffinement. Ces trois "morceaux" de Marie-Helène Guelton m'évoquent une entrée à base de saumon, digne d'un restaurant étoilé. Un bon début pour "s'alimenter" l'esprit et les yeux. Il y a beaucoup de finesse et de délicatesse dans cette petite œuvre, pleine de bon goût.
Péché mignon
Ici, la gourmandise est une vertu. Ce gâteau de rêve de l'américaine Carmen Tostado fait vraiment envie : une grosse pâtisserie à base de framboise ? Non, une savante empilation de pliages de papier. Si on le mettait dans la vitrine d'un pâtissier, je suis sûr que beaucoup se feraient prendre et céderaient au péché...
Table ronde
Souvenir d'enfance : à table ! Cette exclamation, tout le monde l'a entendu et Agnete Simoni Mortensen ne l'a pas oubliée. Elle propose donc cette table en fins fils de fer, une dentelle raffinée.
Expression de l'organique
Ce que l'on mange vient souvent de la terre. Plusieurs artistes se sont intéressés à l'aliment comme matière organique. Ce retour aux origines est illustré par une sphère évolutive de l'artiste finlandaise Minnamarina Tammi. Je regarde également cette succession de petits éléments circulaires et de graines : les débuts de la chaîne de l'alimentation.
Famine
Mais les artistes n'oublient pas les difficultés liées au problème de la faim dans le monde. Elle tenaille, au quotidien, des milliers d'hommes sur notre planète. L'argentine Myriam Jawerbaum surprend avec ses yeux qui vous regardent, comme une supplication. Elle jette aussi un pont vers le surréalisme et les œuvres de Magritte.
Communion
Se nourrir, avoir la peau du ventre bien tendue est une satisfaction, mais donner à manger à son âme et son esprit en est une autre. Depuis la nuit des temps, on sait que prendre un repas n'est pas seulement s'alimenter au même moment, mais accomplir un acte de partage et de communion. Cette dimension spirituelle est présente dans une œuvre de l'artiste espagnole Maria Munoz. Elle expose une coupe blanche de coton, qui rappelle un calice. Le socle, lui, est une sorte de grande hostie. Je remarque qu'il est constitué d'un incroyable enchevêtrement de fils. Je vois également un texte qui courre sur le "verre" sur le thème de la poésie. Mais la symbolique christique saute aux yeux. .
Partage
Comme le tableau de Leonard de Vinci "La Cène", ce groupe de personnages de Chrsitina Gamez et Tahiche Diaz a une portée symbolique, spirituelle évidente. J'observe longuement cette œuvre et je vois que les têtes des participants sont recouverts par leurs vêtements. Sans visage, tout réalisme, tout sens de l'anecdote, disparait. Il ne reste que l'essentiel : la dimension mystérieuse, religieuse.
Devoir de mémoire
Maria Lai, travaille sur le thème de la mémoire. Elle expose, sur une table, recouverte d'une grande nappe de magnifiques livres en terre cuite. Cette créatrice se passionne pour les traditions et l'héritage artisanal de sa Sardaigne natale. J'ai un petit coup de cœur pour cette installation intemporelle et forte.
Histoire et courants d'air
Jason Pollen, au travers d'arrangements d'éléments végétaux, explore les sources historiques de notre alimentation. J'observe ces petites branches, dont certaines sont entourées de fils de couleur, tandis que d'autres se balancent doucement, sous l'action du premier courant d'air venu : très beau.
Architectures
L'installation gigantesque de l'américaine Kendall Buster, diplômée en biologie et en art, occupe la majeure partie du cœur du beffroi. Elle veut mêler l'organique et l'architectural, en s'inspirant des constructions modulaires des insectes. Mais elle s'inspire également de la nef principale de l'église Saint François de Côme, pour laquelle l'œuvre à été initialement conçue. Ces arches de tissus, sorte de cloître fragile et poétique, cassent l'aspect un peu rigide de la grande salle du beffroi et offre une belle complémentarité avec les mini œuvres.
Sur ce thème passionnant de "L'invitation à table", le comité de sélection aurait pu être un peu plus exigeant, tout n'est pas au même niveau... Mais une fois encore, Miniartextil offre quelques belles surprises. Le textile étant toujours aussi présent dans l'art contemporain, j'ai pris plaisir à me nourrir de quelques belles sensations. Au fil des ans, Miniartextil poursuit son chemin, cette année une programmation hors les murs s'installe à la Cité Internationale Universitaire de Paris. Le menu artistique, proposé par Miniartextil 2016 offre donc de nombreuses œuvres à déguster sans modération. Et l'addition est tout à fait raisonnable : l'entrée est gratuite.
Beffroi de Montrouge : 2 place Emile Cresp. 92120 Montrouge
De 12h à 19h
Entrée libre
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